Le Groupe MR au Sénat appelle à une réforme de la législation sur les marchés publics en faveur d’une économie plus dynamique et compétitive.

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Le rapport d’information relatif à l’amélioration des procédures de marchés publics a été approuvé ce vendredi 19 avril lors de la séance plénière du Sénat.

À la base de ce rapport, c’est le groupe MR du Sénat qui lance un appel urgent pour une réforme de cette matière.

Ce secteur clé représente en Belgique plus de 60 milliards d’euros, soit environ 10 à 15 % du produit national brut (PNB). Il est un moteur de croissance et d’innovation accessible à toutes les entreprises, en particulier aux PME qui sont aujourd’hui étouffées par des procédures lourdes et compliquées.

Philippe Dodrimont, rapporteur de ce rapport : « À l’heure où notre économie nécessite un véritable coup d’accélérateur, il est incompréhensible que les PME, véritables piliers de notre économie, soient toujours entravées par une série d’obstacles : procédure trop complexe, manque de formation des acteurs concernés, critères d’attribution des marchés trop restreints, délais de paiement trop longs, procédure digitale compliquée,.. . Les 56 recommandations de notre rapport visent à alléger immédiatement les formalités et procédures pour permettre à toutes les entreprises de concourir sur un pied d’égalité​​ et de développer leur activité».

Gaëtan Van Goidsenhoven, chef du groupe MR au Sénat, insiste : « Nous ne pouvons plus attendre. Chaque jour compte pour nos PME actuellement privées de tous ces marchés. Les réformes proposées sont concrètes et pour beaucoup faciles à mettre en œuvre. Elles feront de la Belgique un pays à la pointe en matière de gouvernance économique transparente et dynamique. Notre engagement est clair : simplifier et accélérer l’accès aux marchés publics ».

Notre groupe s’engage à pousser pour l’adoption rapide de ces réformes dès le début de la prochaine législature. Ces changements profonds incluront :

  • Simplification du cadre réglementaire : alléger les normes légales et administratives pour rendre les marchés publics plus accessibles aux PME.
  • Amélioration de la formation : renforcer la formation des entreprises aux procédures de marché public et développer des outils d’information plus efficaces.
  • Révision des critères d’attribution : favoriser des critères diversifiés et non plus exclusivement basés sur le prix, incluant des considérations de qualité et d’impact environnemental.
  • Réduction des délais de paiement : imposer des délais de paiement stricts et fiables pour soulager la trésorerie des entreprises.
  • Digitalisation simplifiée : rendre les procédures numériques plus intuitives et accessibles, afin de réduire les charges administratives.

Notre mission est claire : transformer les défis en opportunités pour tous les acteurs économiques de notre pays.

Retrouvez ici le rapport d’information

Retrouvez ici l’intervention du sénateur Philippe Dodrimont

Madame la Présidente,

Chers Collègues,

Les marchés publics sont une matière technique, complexe, mais ô combien importante pour nos entreprises. Ils constituent en effet un outil économiques stratégique.

D’abord, du point de vue de l’intérêt public, l’utilisation optimale d’un marché public permet d’équiper de manière efficace et efficiente les territoires, les bâtiments, les écoles, les logements publics, les voies de communication, les hôpitaux, les centres sociaux et d’accueil, les infrastructures sportives, de secours, de protection, etc.

Ensuite, du point de vue économique, les marchés publics font partie des outils principaux qui contribuent positivement à la croissance économique, à la création d’emplois ainsi qu’à l’innovation. Une innovation, par ailleurs, si importante face aux défis sociétaux et environnementaux auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés.

En d’autres termes, les marchés publics sont une source considérable de développement sociétal qu’il y a lieu constamment de dynamiser.

Je remercie mes collègues de la commission des affaires transversales pour l’intérêt qu’ils ont porté à cette matière qui nous amène aujourd’hui en séance plénière en cette fin de législature. Leur contribution, via le dépôt d’amendements, ainsi que les auditions menées au sénat ont permis d’améliorer le rapport d’information initial.

Mon groupe a planché longuement sur les marchés publics. Déjà en septembre 2021, nous avons consacré notre journée d’études de rentrée à ce sujet. Plus que jamais nous nous sommes rendus compte de la nécessité urgente de faire bouger les lignes et de faire le point sur l’utilisation des marchés publics.

En effet, pour être attractifs pour nos PME, ils se doivent d’être accessibles, rapides, faciles d’utilisation pour y répondre et adaptés aux réalités de terrains des différents acteurs impliqués dans la procédure que ce soit comme adjudicateur ou adjudicataire.

On en est loin, très loin. Les réformes sont urgentes. Pour étayer ce propos, ce Rapport d’information met en lumière 6  obstacles majeurs évoqués lors des auditions tenues en commission. 13 experts ont été entendus. Leurs avis sont unanimes et relatent toujours les mêmes difficultés majeures en ce qui concerne l’accès de nos PME aux marchés publics:

1er constat : la complexité du cadre légal et des procédures. En effet, cette matière est régie par plusieurs lois, de nombreux arrêtés royaux et des directives européennes qui la rendent indigestes et source de multiples contraintes ; région, fédéral et Europe se partagent le gâteau rendant encore plus difficile la compréhension des procédures.

2ème constat, le manque d’information et de formation des différents acteurs en ce qui concerne la législation des marchés publics ;

3ème constat : les critères d’attribution non exploités et autres que le prix.

4ème constat : les délais de paiement trop longs pour les entreprises.

5ème constat : les procédures digitales des marchés publics trop complexes.

Et 6ème constat : l’accès difficile aux marchés publics pour les PME et TPME.

 

56 recommandations ont été élaborées sur base de ces 6 constats.

En synthèse on peut les résumer comme suit :

 

En termes de simplifications des procédures: il s’agit de

  • Simplifier les procédures en-dessous des seuils européens avec une loi belge plus adaptée aux réalités de terrains de nos régions. Cette simplification devra être accompagnée d’une bonne communication vers les acteurs concernés souvent peu armés pour y répondre.
  • Simplifier les appellations des procédures trop nombreuses et souvent peu compréhensibles ;
  • ne pas exiger plus que ce que l’Europe impose ;
  • redynamiser la commission des Marchés publics attachée au Premier ministre et chargée de rendre des avis sur les avants projets de loi et d’arrêtés en la matière pour les rendre plus efficaces ;
  • simplifier les règles relatives à la récolte des extraits des casiers judiciaires et la signature des offres par les conseils d’administration des entreprises soumissionnaires ;
  • De manière générale, mettre à jour de manière globale les exigences formelles, délais, montants des pénalités tant pour la reconnaissance des entrepreneurs nécessaire pour accéder aux marchés publics (loi du 20 mars 1991dont les seuils ont été indexés en 2000) ; que les règles d’exécution des marchés publics qui datent de 2013 !
  • simplifier le document unique de marché européen (DUME) et expliquer aux acteurs de terrain les erreurs fréquentes quand il est rempli.

 

En ce qui concerne la formation et information des acteurs, il s’agit de :

  • Renforcer les moyens du BOSA pour un meilleur soutien des pouvoirs adjudicateurs
  • Créer des partenariats entre les pouvoirs publics et les établissements de l’enseignement supérieur pour des formations efficaces et adaptées aux réalités de terrain
  • Certifier les trajets de formation dans une base réglementaire

 

En ce qui concerne les critères d’attribution non exploités ou autres que le prix, il s’agit de :

  • Tendre au sein des instances publiques vers les 100%, dans le cadre d’objectifs progressifs, pour les marchés publics responsables incluant les critères de durabilité, tels que les critères sociaux, éthiques et environnementaux sans bien sûr constituer un frein pour nos entreprises et dans le cadre d’ une concertation avec les secteurs concernés pour conclure des accords de coopération au niveau sectoriel
  • Sensibiliser les adjudicateurs à une pondération équilibrée entre les différents critères via la mise à disposition d’un guide comme aux Pays-Bas qui explique comment définir efficacement les différents critères possibles lors de la phase préparatoire au marché.

 

Délais de paiement trop longs, il s’agit de :

  • Rédiger une circulaire sur les règles de paiement encore beaucoup trop complexes ;
  • Prévoir une liste de clauses abusives pour le B2G comme pour le B2B
  • Exiger un délai de paiement le plus court et réaliste possible dans le chef des adjudicateurs publics en appliquant le délai de 60 jours civils pour les paiements, sans prévoir de dérogations comme le propose la commission européenne dans une proposition du règlement du 12 septembre 2023.

 

Pour les procédures digitales des marchés publics trop complexes, il s’agit de :

  • Simplifier la plate-forme E Procurement qui reste très lourde et chronophage pour les petites entreprises qui n’ont pas le temps, ni les compétences pour l’utiliser correctement ;
  • Favoriser la transparence de la numérisation pour informer le pouvoir adjudicateur du nombre d’offres qui l’attendent pour réagir en conséquence si aucune offre n’est rentrée par une publicité supplémentaire ou un allongement du délai de dépôts des offres
  • Prévoir des séances d’information avant la publication d’un marché pour discuter du cahier des charges et le faire correspondre au mieux aux réalités économiques des entreprises ;
  • Quant à l’obligation d’envoyer les factures par voie électronique aujourd’hui en vigueur, il s’agit d’analyser rapidement l’impact de cette nouvelle procédure sur les entreprises

 

En ce qui concerne l’accès des PME aux marchés publics, il s’agit en plus de ce que j’ai déjà évoqué :

  • D’encourager les pouvoirs adjudicateurs à recourir davantage à l’allotissement pour faciliter l’accès aux PME : La technique de l’allotissement consiste pour le pouvoir adjudicateur à subdiviser son marché en plusieurs parties à l’intérieur de celui-ci, de manière à permettre le dépôt d’une offre ne portant éventuellement que sur l’une ou l’autre de ces parties.

 

La division en lots peut en effet intervenir en fonction des différentes branches d’activité et spécialisations concernées ou selon les différentes phases successives du projet. La division d’un marché en lots présente de nombreux avantages :

  • une concurrence élargie ;
  • un meilleur accès des PME à la commande publique;
  • une meilleure maîtrise de la qualité ;
  • des procédures de passation adaptées ;
  • une gestion mieux répartie des moyens budgétaires
  • et une accélération de l’exécution.

 

A noter néanmoins la nécessité d’une coordination poussée des différents lots et une plus grande dilution des responsabilités des adjudicataires.

En résumé, ce qui coince surtout et qui entrave l’accès des TPE et PME aux marchés publics : ce sont les conditions d’accès aux marchés publics trop exigeantes, les chances trop limitées de décrocher un marché et évaluées à environ 10 à 15 %,  les charges administratives élevées et complexes, mais également les délais de paiement souvent beaucoup trop longs.

Il importe dès lors de penser à mettre en place au plus vite un dispositif légal qui crée un subtil équilibre au niveau de la charge de travail qu’implique un marché public tant pour les entrepreneurs que pour les pouvoirs locaux souvent démunis par rapport à l’ampleur de la tâche.

Un marché public constitue en quelque sorte la rencontre de deux univers à un moment donné, à savoir d’un pouvoir adjudicateur qui souhaite obtenir des fournitures, de faire réaliser des travaux ou des services et d’une société dont le but est de faire des affaires et qui remet une offre. Ces deux univers qui se rencontrent ont encore trop souvent du mal à se comprendre, parce que la culture et les procédures de travail sont différentes. C’est pourquoi, ce rapport d’information préconise plus de souplesse, des procédures plus rapides, plus accessibles, plus simples, plus adaptées aux réalités de terrain de nos entreprises pour plus de résultats économiques en faveur de nos régions et de notre pays.

Le défi est de taille mais en vaut la peine si on veut rendre plus fluides les plus de 20.000 marchés publics qui représentent plus de 60 milliards d’euros. Le jeu en vaut la chandelle.