Le CEGES a-t-il gardé son indépendance ?

Le Centre d’étude Guerre et Société (CEGES) a été absorbé début 2016 par les Archives générales du Royaume. Dans une question écrite à la secrétaire d’Etat Elke Sleurs, le Sénateur Alain Destexhe se préoccupe de l’indépendance de cet organisme qui a fait ses preuves depuis 1967.

C’était en 1967. Le Centre d’étude Guerre et Société (CEGES) était créé. Depuis lors, de nombreux travaux ont été réalisés par celui-ci, ayant un grand impact du point de vue de la recherche historique en Belgique (plus d’info via ce lien). Quelques exemples : « La Belgique docile » qui traitait de la persécution des juifs de Belgique ou encore l’enquête sur l’assassinat de Julien Lahaut.

Le CEGES, Alain Destexhe y fait mention dans une question écrite récemment adressée à Elke Sleurs, la secrétaire d’Etat N-VA en charge notamment de la Politique scientifique. Le Sénateur MR fait en fait référence à l’absorption en janvier dernier du Centre d’étude par les Archives générales du Royaume.

C’est que, comme l’explique Alain Destexhe, « le point fort du CEGES était pour beaucoup le fait de conjuguer les points de vue du Nord et du Sud du pays en ayant recours à des historiens de tous horizons en Belgique, cela créant un point de vue riche, croisé et diversifié des réalités historiques ».

Le citoyen ixellois continue en rappelant qu’au moment du transfert vers les Archives générales du Royaume, « certaines inquiétudes avaient émergé quant à la capacité du CEGES à maintenir ce niveau d’analyse et à rester une plate-forme de recherche basées sur la coopération entre les historiens du pays sur diverses thématiques. Cependant, l’exposé des motifs de la loi était très rassurant sur ce point… »

Elle disait en effet que « La direction opérationnelle bénéficie de l’autonomie opérationnelle pour préserver les spécificités du CEGES ».

Pas de quoi complètement rassurer Alain Destexhe, lequel a donc demandé à la secrétaire d’Etat le bilan que celle-ci tirait aujourd’hui de l’absorption précitée et si les objectifs d’une meilleur préservation accessibilité des archives avaient été atteints.

« Le travail du CEGES, notamment du point de vue de son indépendance, a-t-il été affecté, questionne également le Sénateur. Avez-vous enfin pu recueillir le point de vue de scientifiques afin de voir la manière dont ce changement est perçu après quelques mois ? »

La réponse était attendue au plus tard le 23 juin… et elle est arrivée le 23 juin.
La voilà dans on intégralité:

« L’intégration du CegeSoma comme direction opérationnelle (DO) au sein des Archives de l’État est un processus à divers niveaux, tant administratifs et financiers que scientifiques. Après cinq mois, il est sans doute prématuré de faire déjà un premier bilan détaillé.

1) Les archives du CegeSoma ont toujours été accessibles de façon exemplaire et l’amélioration de leur préservation et de leur accès n’était pas la motivation première. Cependant, l’alignement des normes d’ouverture à la recherche et d’inventoriage sur celles des Archives de l’État pourra à moyen terme augmenter la qualité.

2) Depuis le 1er janvier 2016, les décisions en matière de budget et de personnel ne sont plus prises au niveau du CegeSoma mais du conseil de direction des Archives de l’État. L’autonomie scientifique est garantie, vu que les missions de la DO CegeSoma ont été reprises telles quelles dans l’arrêté royal d’exécution et ajoutées aux missions des Archives, et que la continuité d’un comité scientifique spécifique est prévue. Celui-ci est compétent pour transmettre des avis au conseil scientifique des Archives, conseil où le CegeSoma est lui-même représenté par deux membres (le directeur et le président du comité).

3) L’intégration du CegeSoma aux Archives de l’État constitue une opportunité pour les deux. C’est évidemment un processus qui prend du temps, le CegeSoma ayant été un petit centre autonome depuis toujours. La proximité disciplinaire entre les scientifiques facilite grandement l’intégration. Le statut du CegeSoma se trouve consolidé et il bénéficie des infrastructures des Archives, notamment en province, pour pouvoir rayonner dans tout le pays.

L’avenir du Journal of Belgian History est assuré grâce aux Éditions des Archives, qui disposent de leur propre imprimerie. Des initiatives ont été prises pour renforcer les liens entre les scientifiques (organisation d’une journée annuelle rassemblant tous les scientifiques afin de développer l’esprit de corps, collaboration dans le cadre du programme BRAIN et d’autres projets de recherche conjoints, etc.). »